samedi 30 juin 2018

Ressource - Le Coffre Sculpté pour vos campagnes "Sword and Sorcery" Old-School

Je fouinais sur le Web à la recherche de ressources diverses et variées pour jouer dans une ambiance Sword and Sorcery et trouvé des inspirations et des choses à adapter à "Barbarians of Lemuria". Et je suis tombé sur ce vieux scénario publié dans Casus Belli en 1996 pour "Elric", une aventure tout à fait adaptable à n'importe quel univers de Sword and Sorcery voire à du Medfan type D&D.


Le Coffre Sculpté

Casus Belli N° 93 - avril 1996




Introduction

Menii, capitale de l’île des Cités Pourpres, en automne. Les PJ sont entre deux engagements, et l’argent commence à se faire rare. Un soir, ils reçoivent une lettre, leur demandant de se rendre, le lendemain matin, au siège de la maison Lyrian (l’une des principales familles marchandes de la cité). On leur propose un travail « difficile, mais bien payé ». Bien entendu, cette introduction peut être modifiée à votre gré, en fonction du passé des PJ et de leur réputation…

La maison Lyrian occupe un imposant groupe de bâtiments, mibanque, mi-entrepôt, sur le port. Il y règne une activité fébrile. Il suffit aux PJ de montrer leur convocation à l’un des employés pour être conduits à l’étage, dans le bureau de maître Lyrian en personne. C’est un gros homme chauve, très souriant et très courtois. Il accueille les personnages comme s’ils étaient de vieux amis, leur fait servir à boire, et commence à parler affaires. Sa jovialité apparente dissimule une certaine nervosité, les PJ qui réussiront un jet de Sagacité s’en rendront compte.
« Je suis, comme vous le savez sans doute, propriétaire d’une importante flotte marchande. Hélas, l’un de ses plus beaux fleurons, l’Herminia, a disparu en mer il y a quelques semaines. Enfin, en mer… En vue de la côte lormyrienne, plus exactement. Je voudrais que vous retrouviez l’épave et, si possible, que vous me rameniez ce que vous pourrez sauver de la cargaison. Pour ce qui est de la rémunération, j’offre 2 000 pièces de bronze par personne, plus une prime représentant 1% de ce que vous pourrez récupérer. Pour vous donner un ordre de grandeur, la cargaison dans son ensemble était estimée à 300 000 pièces de bronze. L’Ullna, mon navire le plus rapide, vous attend au port. Des questions ? »

Il répondra de son mieux aux inévitables interrogations des PJ.

• Il sait que l’Herminia a coulé dans ces parages, car un autre de ses navires l’a croisé au moment où il doublait le cap Ténèbres, qui marque la frontière entre l’Argimilar et le Lormyr.

• Entre le cap Ténèbres et Trepasaz, la destination de l’Herminia, il n’y a que deux petites journées de navigation, presque toujours en vue de la côte.

• La cargaison se composait essentiellement de balles de laine, plus un peu de bois et divers paquets ou caisses destinés à des particuliers. Si les PJ en font la demande, il leur fournit la liste complète des marchandises. On y trouve, entre autres, un « coffre ancien et sculpté », qui leur donnera bientôt du fil à retordre, mais ce n’est pas la peine de le mettre en évidence pour le moment…

Les PJ n’ont plus qu’à rentrer chez eux, à faire leurs bagages et à se présenter au port. L’Ullna, un petit navire aux formes élancées, les attend.

Le dessous des cartes

Comme tous les marchands des Cités Pourpres, maître Lyrian est incapable de résister à l’appât du gain. Lorsqu’un individu – qui ne s’est pas présenté – lui a offert 10 000 pièces d’argent pour acheminer, le plus rapidement et le plus discrètement possible, un gros coffre ancien jusqu’à Trepasaz, il n’a pas dit non. Il ignore tout de son contenu, et serait horrifié d’apprendre qu’il renferme un démon très ancien et très féroce (d’autant plus que la loi lormyrienne n’est pas tendre avec les adorateurs du Chaos et leurs complices).

Pour la petite histoire, ce coffre a été retrouvé dans les ruines d’une villa melnibonéenne, près de la ville de Kariss. Il est destiné à Gerthun Aarn, un sorcier dharijorien installé à Lormyr. Ce dernier désire étudier la manière, fort peu orthodoxe, dont le démon est « lié » au coffre sans en faire vraiment partie (la sorcellerie melnibonéenne de l’antiquité est pleine de surprises de ce type).

Lorsque l’Herminia n’est pas arrivé à Trepasaz dans les délais prévus, Gerthun s’est embarqué pour Menii toutes affaires cessantes. Il a eu une brève conversation avec Lyrian, et l’a effrayé juste assez pour que le marchand décide d’embaucher quelques personnes pour retrouver le navire. Le destin a voulu que l’Herminia soit victime d’une petite bande de naufrageurs, installés sur l’île de Valannsaz.
Ces bandits ont massacré l’équipage et récupéré la cargaison. Parmi les épaves rejetées sur la plage se trouvait le coffre, richement orné et fermé par plusieurs serrures compliquées. Espérant de l’or et des joyaux, les naufrageurs l’ont forcé sur place… libérant, du même coup, le démon qu’il contenait.
Après avoir massacré quelques personnes, la créature s’est dirigée vers le centre de l’île. Elle n’a pas été poursuivie. D’ici à ce que les PJ la retrouvent, elle sera confortablement installée au château de Valannsaz.

Le voyage

L’Ullna a un équipage de six marins, commandé par le capitaine Fiorel, un petit homme barbu aux gestes vifs. Si les PJ ne sont pas marins, il se montrera très clair: il n’a pas envie de les avoir sans cesse dans les jambes. Il préfère, et de loin, qu’ils restent sagement dans leurs cabines. Si les personnages s’arrangent pour sympathiser avec lui, il deviendra petit à petit plus aimable (il suffit de se montrer respectueux, et de l’écouter raconter ses nombreuses et improbables aventures). Toute cette affaire intrigue beaucoup le capitaine, et il leur fera peut-être part de son étonnement: « C’est bien la première fois que je vois le patron s’exciter parce qu’il a perdu un navire. Ce n’est pas le premier, et pour sûr, ce ne sera pas le dernier. Mais bon, il est assuré. Et la côte de Lormyr est plutôt dangereuse. C’est plein de courants vicieux et de récifs, par là. Alors franchement, je ne sais pas ce qu’il a… »

Au bout d’une dizaine de jours de navigation sans histoire, l’Ullna arrive en vue du continent méridional. Le navire longe la côte argimilienne pendant un moment, puis franchit le fameux cap Ténèbres, et oblique au sud-ouest, le long de la côte de Lormyr. Du pont, les PJ peuvent voir des kilomètres et des kilomètres de falaises, avec de loin en loin une petite plage de galets et quelques villages de pêcheurs.

A partir de là, les PJ prennent le commandement des opérations (même si Fiorel n’est pas d’accord, il obéit aux ordres de son armateur). Ils peuvent s’entasser dans une chaloupe et s’approcher de la côte pour aller visiter les villages. Les pêcheurs sont misérables, taciturnes et facilement effrayés par tout ce qui vient de la mer (les esclavagistes pan tangien font régulièrement des raids dans la région). Personne n’a entendu parler d’un naufrage récent… En revanche, tout le monde se souvient qu’il y a eu une violente tempête, à peu près au moment où l’Herminia devait croiser dans les parages.

Le second jour, le temps se gâte. La houle prend de l’ampleur, et il commence à pleuvoir. Bientôt, le ciel est complètement noir. C’est le moment de demander aux personnages de faire un jet de CON x 2. S’il est manqué, ils sont à peine capables de rester dans leur cabine et vomissent tripes et boyaux. S’il est réussi, en revanche, ils ne sont pas trop affectés par le mauvais temps, et peuvent se risquer sur le pont. C’est un bon moment pour leur faire très peur, les vagues sont plus hautes que le grand mât de l’Ullna, l’obscurité est presque totale, tout juste trouée par des éclairs. Un marin passe par-dessus bord. Faites en sorte qu’ils se croient perdus… lorsque la vigie aperçoit un lumière à bâbord.
Les hommes d’équipage poussent des hourras: c’est celle du phare de Trepasaz. Seul le capitaine est un peu perplexe. Il se croyait encore assez loin du port. Il ordonne quand même de mettre le cap dans cette direction.

Quelques minutes plus tard, le navire s’éventre sur des récifs. En fait de phare, ce n’était qu’un feu allumé par les naufrageurs de Valannsaz. La situation est idéale pour tester les réflexes des PJ en situation de crise. Résumons-nous: ils sont à bord d’un navire qui coule, au milieu d’une tempête. Ils ont le choix entre se noyer sur place ou se jeter à l’eau (et, sans doute, se fracasser le crâne contre un rocher). Que font-ils ? Que prennent-ils avec eux ? Essayent-ils de sauver des marins ? Et, d’abord, savent-ils nager ? Demandez trois jets de Natation et un jet de Chance par personne pour atteindre la côte. En cas d’échec, appliquez la procédure de noyade et ajoutez 1d6 points de dommages à cause des récifs. Laissez les PJ inventer leurs propres stratégies pour se sortir de ce mauvais pas. Certaines idées les mèneront sans doute à un désastre encore pire (par exemple, s’encorder garantit pratiquement que tout le monde boira la tasse). D’autres, comme une application judicieuse de certains sorts de magie mineure, peuvent leur sauver la vie.

Au fond, peu importe. Au terme d’une lutte épuisante, ils parviennent à prendre pied sur la plage. Ils ont peut-être sauvé leurs armes, mais certainement pas leurs armures. Et, justement, les naufrageurs leur ont organisé un comité d’accueil. Une demidouzaine d’hommes et de femmes plus ou moins déguenillés s’approchent d’eux. Ils sont armés de bâtons et de filets, et bien résolus à les achever (ce sera le sort des malheureux marins qui ont réussi à rejoindre la plage). La bagarre ne devrait pas durer très longtemps. Même blessés, les PJ sont normalement de taille à venir à bout d’une bande de paysans… d’autant plus qu’au premier blessé grave, ils s’enfuient sans demander leur reste.




L’île de Valannsaz

Plus ou moins ovale, et mesurant cinq kilomètres sur trois, cette île se trouve à une demi-journée de mer de Lormyr. Elle est entourée par des courants violents. La côte nord est relativement basse. Partout ailleurs, elle est entourée de falaises mesurant par endroits une cinquantaine de mètres de haut. Les PJ peuvent s’y promener à loisir. Voici une brève description des lieux les plus importants.

• Le village. Tant qu’il fait beau, c’est un sympathique village de pêcheurs et d’éleveurs, peuplé de braves gens qui travaillent dur. Lors des tempêtes, toutefois, il prend son véritable visage: un repaire de naufrageurs. Les maisons, très pauvres en apparence, sont meublées avec un luxe surprenant. Beaucoup d’entre elles ont été construites avec des morceaux d’épaves.

• Le château. Une petite forteresse carrée, en pierre blanche, avec un gros donjon. Le pont-levis est baissé, et les gardes n’ont pas l’air très vigilants.

• Le port secret. A moins que les PJ ne disposent d’une embarcation, ils ont peu de chances de repérer cette grotte dans la falaise. Elle abrite une petite nef extrêmement rapide.

• Les prairies. Très verdoyantes, et parsemées d’abris en pierre sèche où les bergers se réfugient lorsque le temps se gâte. Quand il fait beau, on peut y voir des troupeaux de moutons.

• Le temple. Une petite chapelle en mauvais état, qui porte la flèche de la Loi à son fronton. On y trouve une épaisse couche de poussière, une statue de Tovik l’Implacable et, dissimulé dans la crypte, le cadavre à demi décomposé du prêtre, tué par le démon au lendemain de son arrivée.

• Les grottes. Ces quelques salles à demi inondées ont servi, il y a quelques siècles, de temple des Élémentaires. Depuis, elles ont été reconverties en abri pour contrebandiers, puis abandonnées. Sarvean, le survivant du naufrage de l’Herminia, y passe l’essentiel de ses journées.

Petite note météorologique

Pendant le séjour des PJ sur l’île, il pleut tout le temps. N’oubliez pas ce détail lorsque vous leur décrirez le décor. Tantôt c’est un petit crachin, tantôt un rideau de pluie si épais qu’on y voit pas à dix mètres. L’humidité s’insinue partout, et il fait froid. La pluie influe sur le moral des habitants, mais aussi sur la visibilité, sur l’état du sol (si les PJ explorent l’île, ils vont passer un temps infini à patauger dans la boue) et sur l’usage des armes (les arcs, notamment, n’aiment pas l’humidité. Vous pouvez imposer un malus de 20% aux archers).

Naufragés !

Quelques heures plus tard, le jour se lève. Les PJ se trouvent à la pointe nord de l’île, sur une plage jonchée de débris (fragments de l’Ullna, tonneaux, ballots, caisses)… A une centaine de mètres de là, la carcasse de leur navire achève de se disloquer. Beaucoup plus loin sur la plage s’élève une colonne de fumée désignant un village. Vers l’intérieur de l’île, le terrain monte rapidement. C’est le moment de poser la traditionnelle question: Que faites-vous ? Chez les pêcheurs, on leur jette des pierres et on tente, une fois de plus, de les tuer. Les bergers sont à peine plus coopératifs. Ils les laissent se réchauffer près du feu, mais n’ont rien à leur donner, ni vêtements secs, ni nourriture. De plus, ils parlent un patois lormyrien à peine compréhensible. Logiquement, tôt ou tard, les PJ devraient se rendre au château.

Le château

Après une brève conversation avec des gardes obtus à souhait, les PJ obtiennent une audience auprès du baron Thorvald. Celui-ci semble navré d’apprendre leur situation et leur promet qu’il les aidera à rejoindre le continent. « Nous avons assez régulièrement des visites. D’ici… oh !, une semaine ou deux, un bateau devrait passer. Bien entendu, en attendant, vous êtes mes hôtes. » Les PJ sont installés dans des appartements qui sentent légèrement le moisi, munis de vêtements propres (mais pas d’armes !), et invités à un banquet pour le soir même. Ce sera une bonne occasion de faire plus ample connaissance avec leurs hôtes.

• Thorvald, baron de Valannsaz. Un gros homme à la barbe et aux sourcils broussailleux, défiguré par une cicatrice qui va du menton à son oreille droite. Il est colérique, brutal, fourbe et aigri. Son plus grand plaisir est de terroriser son entourage, et ce n’est pas la présence des PJ qui va le pousser à réfréner ses mauvais instincts. Il traite le problème des naufrageurs très à la légère, et prétend « que ce sont des pirates venus d’une île voisine. Malheureusement, nous ne pouvons pas y faire grandchose ». En fait, il touche un coquet pourcentage sur leurs activités.

• Hermengarde, sa femme. Mince, blonde, encore belle malgré les traces des nombreux coups qu’elle reçoit de son mari. Elle vient de Iosaz, l’une des plus grandes villes du continent sud, et est absolument ravie d’avoir des nouvelles du monde extérieur. Bien entendu, si elle s’approche trop des PJ, son mari risque de piquer une crise de jalousie meurtrière…

• Rachilde, leur fille. Une gamine de dix ans, très intelligente, très observatrice et très solitaire. Elle passe beaucoup de temps à jouer dans un coin de la grande salle, écoutant les conversations sans en avoir l’air. Ses poupées l’intéressent nettement plus que les PJ, mais si ces derniers se montrer gentils et patients, ils pourront peut-être avoir une conversation intéressante avec elle. Elle trouve le père Hagen « bizarre » depuis quelque temps.

• Wayaria, la maîtresse du baron. Fille et petite-fille de naufrageurs. Très jolie, très ambitieuse, pas très maligne, et bien résolue à ne pas « moisir ici éternellement ». Sous l’influence du démon, ses plans mûrissent à grands pas. Elle rêve de provoquer un « accident » qui serait fatal à la baronne et à sa fille. Après quoi, elle épousera le baron, peu avant que celui-ci ne fasse une chute mortelle dans un escalier. Ces formalités accomplies, à elle la grande vie ! Elle tentera sans doute d’assassiner discrètement Rachilde et Hermengarde un jour ou deux après l’arrivée des PJ.

• Damian, l’intendant. Ce petit quadragénaire, d’une laideur peu commune, est l’âme damnée du baron. Il est lubrique, cruel, menteur, mais très vif d’esprit. Depuis des années, il cherche un moyen de mettre la main sur la baronne. Sur les conseils discrets du père Hagen, il en arrive à envisager de l’enlever et de l’amener dans un coin perdu de l’île pour profiter d’elle à loisir. Après, évidemment, il faudra la tuer. Dommage…

• Le père Hagen, « chapelain ». En surface, un grand jeune homme un peu gauche, toujours souriant. Le baron le méprise, et il a l’air complètement débordé par les excès de ses ouailles. En réalité, c’est le démon fraîchement évadé. Après avoir tué le véritable prêtre et pris son apparence il s’est rendu au château où il maîtrise pleinement la situation… Il fera bonne figure aux PJ, mais il se méfiera d’eux d’emblée, surtout s’il y a un sorcier dans l’équipe. Il n’est pas très bon comédien, et sans ses pouvoirs de domination mentale, les habitants du château l’auraient démasqué depuis longtemps. Jouez-le gentil, empressé, mais faites de temps en temps des bourdes. Sa lacune la plus flagrante est son ignorance totale du culte de la Loi, en dehors de vagues généralités. Le baron et son entourage n’étant pas particulièrement croyants, personne n’a rien remarqué pour l’instant.

Huis clos

Les PJ vont sans doute rester un jour ou deux au château avant de comprendre que l’inertie n’est pas une solution. Vous pouvez occuper cette période par une ou plusieurs crises de votre choix. La petite Rachilde pourrait « avoir un accident » (grave mais pas mortel), la baronne pourrait être empoisonnée par Wayaria, ou être enlevée par Damian. Le père Hagen lui-même pourrait venir leur demander conseil, et en profiter pour sonder leurs points faibles… et jouer dessus. Bien entendu, ils peuvent insister pour faire l’inventaire de ce qui reste de la cargaison de l’Herminia, et la récupérer. Le baron semble tout disposé à les aider. Il va même jusqu’à leur prêter deux gardes pour assurer leur protection au village des naufrageurs… gardes qui, au moment où les PJ se méfieront le moins, les frapperont dans le dos. Pas question de laisser des gêneurs interférer avec son petit commerce !

Sarvean

Hirsute et à moitié fou, c’est le seul survivant de l’équipage de l’Herminia. Il s’est installé dans les grottes, et survit en tuant des moutons égarés et des mouettes (les bergers parleront peut-être aux PJ de « ce diable hirsute » qui égorge leurs bêtes). Il fuit d’aussi loin qu’il aperçoit un être humain, mais en même temps, espère toujours que « des secours vont arriver ». Reste aux personnages à le convaincre qu’ils sont les secours. Ce ne sera pas facile !

Notez que le démon est parfaitement au courant de sa présence, et qu’il attend sa prochaine petite chasse hebdomadaire pour aller le massacrer. S’ils tardent trop, les PJ pourraient le trouver couvert de morsures et lacérés de coups de griffes, agonisant dans les grottes. Même dans ce cas, il aura le temps de leur raconter son histoire:

« C’était juste après le naufrage… Sur la plage. Ils ont tué tous les potes… J’étais à moitié inconscient, couché sous le cadavre du second maître… Juste à côté de moi, y avait un gros coffre, tout couvert de sculptures, avec des sortes de lézards… On l’avait mis dans la cache, sous la cale, pour pas que les douaniers le trouvent… C’était un truc important… Les assassins, ils ont cru qu’il était plein d’or, et ils l’ont forcé… Ça s’est ouvert, et y a une sorte de gros crapaud tout noir qu’en est sorti… En deux temps trois mouvements, il en a tué cinq ou six, et il est parti. Moi, j’ai tourné de l’oeil juste après. Quand je me suis réveillé, j’étais tout seul. J’ai erré un moment, avant de trouver les grottes. »

Pressé de questions, il se souvient aussi que « à propos du coffre… Le capitaine, il avait une grosse enveloppe, qu’allait avec, que maître Lyrian lui avait donnée le jour du départ. Il la portait sur lui » (le rituel pour remettre le démon dans son objet de lien).

Et si… les PJ ne trouvent pas Sarvean ?

Les villageois finiront par apprendre que les PJ sont là pour récupérer la cargaison de l’Herminia. L’un d’eux finira sûrement par leur parler du démon… En revanche, ils ne savent rien de l’enveloppe. Et sans elle, il sera beaucoup plus difficile de se débarrasser du démon (mais pas impossible. Au lieu de le remettre dans sa caisse, il faudra le tuer).




Les faits et gestes du démon

Pour l’instant, la situation convient parfaitement au soi-disant Hagen. Il passe ses journées à orchestrer les divers petits drames qui couvent au château, et ses nuits au temple, à tenir de grandes conversations avec le cadavre mutilé du prêtre. De temps en temps, en moyenne une fois par semaine, il sort chasser sous sa véritable forme. Il prend grand soin de ne s’attaquer qu’aux isolés, que ce soit des bergers, des pêcheurs qui se sont attardés sur la grève ou un PJ en promenade. Il ne laisse jamais de témoins…

S’il estime que les PJ représentent une menace sérieuse, il commencera à réorienter les ambitions de certains de ses pions. Il pourrait, par exemple, suggérer à Hermengarde que ces nobles étrangers sont son seul espoir de quitter cette île maudite. Elle est toute disposée à le croire… après quoi, il ira souffler à l’oreille du baron que sa femme s’intéresse beaucoup à ces séduisants étrangers, et il ira s’installer dans un coin tranquille, avec vue sur la catastrophe.

Si les PJ, naïfs et confiants, viennent lui parler de démon en fuite, il prendra l’air très préoccupé, et promettra de faire l’impossible pour les aider. Ensuite, il fera de son mieux pour les aiguiller sur des fausses pistes, du genre « Rachilde est étrange depuis quelques semaines. Je me demande… bien sûr, c’est ridicule mais… et si elle était possédée ? ». Si les PJ gobent ses mensonges, il fera de son mieux pour organiser un « exorcisme » impressionnant, auquel Rachilde ne survivra certainement pas. S’il se sent vraiment compromis, il passera à l’attaque sous sa vraie forme.

Que faire ?

Pour neutraliser le démon, les PJ ont besoin de trois choses:

• Le coffre. Il est, pour l’instant, dans la cave du château, au milieu d’une centaine d’autres objets plus ou moins démantibulés. Hagen monte une garde vigilante autour de cette salle. S’il repère les PJ rôdant aux alentours, il prendra des mesures pour les occuper.

• L’enveloppe et son contenu. Hagen n’est pas au courant de son existence, mais les PJ risquent d’avoir beaucoup plus de mal à la trouver. Les villageois ne sont pas communicatifs du tout… Un mensonge judicieusement dosé ou un coup de force peuvent être payants. Le capitaine de l’Herminia a été tué sur la plage, lors du naufrage, et jeté dans une fosse commune avec les autres marins. La fosse n’est pas très difficile à trouver. Reste à récupérer l’enveloppe, qui se trouve quelque part dans un magma immonde, mi-boue, mi-cadavres. Les PJ vont devoir payer de leur personne… L’enveloppe, en toile cirée, n’a pas trop souffert de son séjour souterrain, et son contenu est intact. Il s’agit d’un parchemin couvert de caractères melnibonéens, accompagnés d’une transcription phonétique en langue commune. Si l’un des PJ maîtrise le Haut Idiome, il comprendra que c’est un ordre, adressé à un démon nommé Iorgga, qui l’enjoint de regagner l’objet de son lien.

• Le démon. Il y a de fortes chances pour que les PJ battent la campagne à la recherche d’un crapaud géant, sans songer une seconde que la créature est polymorphe. Hagen finira certainement par leur devenir suspect… Son ignorance du dogme de la Loi, sa présence très opportune à chaque fois qu’une crise se déclenche, sans oublier le cadavre du véritable Hagen dans la cave du temple, devraient être des indices suffisants…

Conclusion et conséquences

Il suffit de lire le rituel devant Hagen (ou plutôt Iorgga) pour qu’il reprenne sa véritable forme, puis devienne brumeux et se fonde dans la caisse. Cela fait, il faudra songer à rentrer. Contrairement à ce qu’a annoncé le baron, l’île reçoit rarement de la visite, et le seul navire capable d’affronter la haute mer est celui du port secret. Reste à le voler et à rentrer aux Cités Pourpres. Sarvean, qui est marin, sera d’une aide précieuse.

• Que deviennent les PNJ ? La nef du port secret peut abriter une dizaine de personnes, marins compris. Si les PJ sont obligés d’embarquer, disons, la baronne et sa fille, ils vont vite être encombrés.

• Que vont-ils faire du coffre ? S’ils le jettent à la mer, Lyrian et Gerthun ne seront pas contents. Lyrian n’est pas très difficile à calmer. Il est tellement horrifié de découvrir ce qu’il contenait qu’il verse la somme convenue aux PJ, même s’ils n’ont rien ramené. En revanche, Gerthun est un tout autre problème. Est-ce un adorateur du Chaos ? Ou simplement un expérimentateur imprudent ? Travaille-t-il seul ? A-t-il des associés ? Et dans ce cas, qui ? En tant que Dharijorien, son employeur le plus probable reste le Théocrate de Pan Tang, mais ce n’est pas le seul candidat possible, loin s’en faut.

PNJ

Naufrageurs


Comme le paysan, p.198 des règles d’Elric.
Les gardes, le baron et son intendant

Comme le garde municipal, p.196 des règles d’Elric.
Iorgga, démon

FOR 14 CON 13 TAI 12 INT 16 POU 15 DEX 15
APP 13 (0 sous sa vraie forme) PdV 13
Armes (sous sa vraie forme): Griffes 55%, 1d8 + 1d6; Crocs 60%, 2d6.
Compétences: Sagacité 70%.
Facultés: une version modifiée de Changement de forme, qui lui permet de ressembler à un individu précis; Manipulation mentale (lui permet, si un jet POU/POU est réussi au cours d’une conversation, d’avoir une idée assez nette des désirs et des points faibles de ses interlocuteurs. Un seconde lutte de POU/POU lui permet d’insinuer des idées dans la tête d’une personne qu’il a déjà sondée).
Besoin: théoriquement, son propriétaire doit lui sacrifier un être humain par semaine. Mais il s’amuse assez dans l’île pour accomplir lui-même les sacrifices…

Scénario - Tristan Lhomme
illustration - Rolland Barthélémy
plan - Cyrille Daujean

vendredi 29 juin 2018

Artworks - Old-School : Stefan Poag

Stefan Poag est un illustrateur qui a travaillé sur quelques Comics indépendants mais est surtout connus pour ses illustrations (à l'ancienne) de Jeux de Rôles. Il a notamment travaillé sur la série de modules de jeu de rôle Dungeon Crawl Classics publiés par Goodman Games ou encore Labyrinth Lord et d'autres éditeurs spécialisés dans les systèmes de jeu tél OSRIC ou D20 System. J'adore ce type de vieilles illustrations parfois naïves mais elles font parties de ma culture rôliste et sont pour beaucoup dans l'attrait que j'ai eu étant jeune pour découvrir cet univers. Quand en plus le type cite dans les différentes choses qui ont influencées ses travaux, en vrac, les vieux Flash Gordon, les vieux Buck Rogers, Jack Kirby, Steve Ditko, les monstres à la Godzilla, les vieilles illustrations de jeux TSR pour D&D ou Gamma World... Je ne peux que y trouver matière à rêvasser devant ses travaux.

https://stefanpoag.com/



















jeudi 28 juin 2018

Sculptures - Philip Henry Christopher Jackson

Philip Jackson est un sculpteur écossais né le 18 Avril 1944 à Inverness.

Théâtrale et dramatique, les œuvres de Philip Jackson sont énigmatiques, fascinantes, intrigantes.

Portant des masques Vénitiens, ses sculptures se dressent devant nous, aux regards inquisiteurs.

http://www.philipjacksonsculptures.co.uk/











Supplément : Barbarians of Lemuria - Chroniques Lémuriennes

Dernièrement je parlais du supplément "Chroniques Lémuriennes" pour le jeu "Barbarians of Lemuria". Finalement je l'ai commandé et reçu aujourd'hui. J'adore ce type d'univers et à première vue, j'ai de quoi me rassasier avec ce supplément.








Chroniques Lémuriennes se présente sous la forme d'un supplément de 136 pages, d'un superbe écran en trois volets illustré par Emmanuel Roudier et de la très belle carte en couleur dont je vous parlais précédemment.




Dans le recueil hormis des aides de jeu on trouve cinq scénarios signés Vincent Basset, Lionel Beaupère, Arnaud Prié et Andrea Salvatores.

Un aperçu de l'écran !




Le visuel de la couverture !




Un coup d’œil sur la carte !




De la pleine page qui va bien !




Et des illustrations signées Emmanuel Roudier !







Le volume s’ouvre sur deux aides de jeu. La première, assez courte, porte sur le calendrier de Satarla, le plus communément employé en Lémurie – même si pas sans résistances. Mine de rien, c’est un outil d’ambiance très pratique, qui sait susciter un certain exotisme sans pour autant se perdre dans des complexités peu maniables. L’attrait essentiel de ce calendrier, en termes de jeu, réside sans doute, au-delà des fêtes « classiques » mais pas moins pertinentes, dans les « jours flottants » qui viennent semer la zone en temps utile. L’aide de jeu se conclut sur des pistes de scénario, souvent enthousiasmantes, et qui témoignent ainsi de l’usage ludique de ce calendrier.

La deuxième aide de jeu porte sur une région, au nord de la Lémurie, qui avait été passée sous silence dans le livre de base. Bienvenue, donc, dans le Khanat. On fait vraiment dans la connotation sword and sorcery pure, avec cette région où l’inspiration mongole, dès le titre, est flagrante ; sans forcément remonter jusqu’à Harold Lamb (Romancier qui a beaucoup écrit sur les Steppes Mongoles), le lecteur baignera ainsi dans cette ambiance si particulière et récurrente dans le genre, chez Robert E. Howard et bien d’autres, dont, plus récemment, David Gemmell et George R.R. Martin. Cependant, il s’agit d’une influence extrême-orientale plus vaste, car, derrière les farouches cavaliers, demeurent encore les reliquats d’une ancienne civilisation plus raffinée (et donc décadente), d’inspiration essentiellement chinoise. Par ailleurs, tout au nord du monde comme l’est le Khanat, la région est propice à la description d’autres ethnies plus reculées et mystérieuses à leur manière, qui évoquent aussi bien les Inuit que la Sibérie, les Lapons ou les Aïnous, et sans doute d’autres choses encore. Enfin, la proximité du Royaume Putride permet de mettre l’accent sur la thématique des morts-vivants, côté antagonistes, et, que vous songiez ou pas à bâtir une colossale muraille de glace pour en protéger un nombre toujours fluctuant de royaumes « civilisés », il ne fait guère de doute que cela peut contribuer à colorer encore davantage cet environnement de jeu particulier. Le format employé est celui des aides de jeu de background dans le livre de base : c’est court, on va à l’essentiel, et on se contente souvent de donner des pistes au MJ, à charge pour ce dernier de bâtir son monde avec davantage de détails.

Le gros de l’ouvrage consiste en cinq scénarios inédits et plus ou moins « prêts à jouer ».

Nous commençons avec « Un ennui mortel », un scénario prenant place dans le Khanat… ou, plus exactement, au large du Khanat, dans une île très froide, très désolée, et très mal fréquentée. Le scénario, passé l’introduction, adopte une structure non linéaire, comme une sorte de mini-bac à sable calibré one-shot – peut-être pas l’aventure la plus indiquée pour un MJ débutant, même si rien de trop redoutable non plus. Sur cette base, il s’agit de confronter nos héros, et quelques PNJ assez joliment définis, à une invasion de zombies, dans un cadre tenant pas mal du huis-clos. Sans rien révolutionner, loin de là, ce scénario est, sur le papier en tout cas, très amusant.

Le scénario suivant, « Le Plus Vieux Rêve de Lôm » se situe dans les montagnes de l’Axos, et vise à confronter les héros à un dilemme comme de juste cruel, et dont les conséquences peuvent s’avérer très amples, avec les hommes-oiseaux du coin. Ce jeu du dilemme, certes récurent dans le jeu de rôle, avait déjà été mis en avant dans certains des scénarios du livre de base, et c’en est une très futée variation – le scénario promet aussi bien de l’action que de la diplomatie, en parts fluctuantes selon le comportement des joueurs. C’est très alléchant, très convaincant.

Le scénario suivant, « Mariage amer ». Le point de départ est ultra-référencé : en pleine célébration d’un mariage dans la meilleure (et donc la pire) société de Satarla, un amoureux téméraire enlève, avec sa bénédiction, la promise, et à charge pour nos héros de ramener la donzelle, et tant qu’à faire de châtier l’impudent (qui s’appelle Eormo – je rappelle que les anagrammes transparentes sont punies de mort en Nébalie, et, oui, par décapitation après de longues heures de torture). Le scénario promet plein d’action, de la scène de poursuite en nef volante à la découverte des us et coutumes d’une peuplade primitive de la Lémurie, vivant à l’ombre d’une pyramide (forcément), avec quelque chose de serpentin dedans (forcément). Mais, au-delà, ce scénario est bien plus futé qu’il n’en a l’air – et plus inventif à vrai dire. Un truc dans cette histoire, renvoie à sa manière bien particulière au jeu du dilemme, en brodant sur le principe, emblématique de la sword and sorcery, de héros à la moralité plus que douteuse.

L'aventure suivante s’intitule « La Tour d’Ajhaskar », et est globalement plus classique – jusque dans son point de départ : les héros prisonniers se voient faire une offre qu’ils ne peuvent pas refuser… En l’espèce, pénétrer dans la tour d’un puissant sorcier, dont la disparition inquiète le Roi. Le scénario est découpé en deux temps, avec d’abord l’exploration de la tour (un donjon assez classique), puis l’exploration d’un petit univers parallèle qui se trouve au-delà, et qui ne facilite pas exactement la fuite.

Le dernier scénario, un peu à part : « Les Trois Coffres ». D’une certaine manière, c’est la star de ce volume : il a les honneurs de la couverture, et on avait un tant soit peu teasé la bête, dans l’attente de la parution du supplément. En effet, les joueurs se voient ici offrir une opportunité bien singulière : incarner des kalukans, ces bestioles muettes et sans tête, avec un unique œil au milieu de la poitrine, au service de la Reine Sorcière ! D’où les prétirés. L’expérience est prometteuse, et le scénario s’est efforcé de jouer de cette particularité avec quelques idées rigolotes (comme le dispositif auquel les kalukans doivent avoir recours pour communiquer, entre eux et avec les PNJ, ou ce moment du scénario où les joueurs… changent de kalukan).

Chroniques Lémuriennes est donc un très bon supplément et l'idée d'une gamme frenchy pour Barbarians of Lemuria s'avère très enthousiasmante.

lundi 25 juin 2018

Inspiration - The Trigan Empire / Storm - Don Lawrence

Moi qui suis fan de vieille SF, parcourir le Web pendant mon temps libre me permet de découvrir quantité de sources peu connues ou oubliées de part chez nous, voire inconnues car nombre d'entre-elles ne sont jamais parues dans la langue de Molière. Ce n'est pas le cas pour celle-ci qui a eu droit à une édition Française à la fin des années 70 chez Septimus et une autre dans les années 80 chez Glénat. Il y a un petit quelque chose de Flash Gordon dans cet univers qui n'est pas pour me déplaire.

C'est cette superbe carte de Don Lawrence qui m'a poussé à en savoir plus, vous savez j'aime bien les cartes, elles sont assez évocatrices quand elles sont bien réalisées de l'ambiance d'un monde imaginaire.




L'Empire de Trigan ou Trigan (The Rise and Fall of the Trigan Empire, puis The Trigan Empire) est une série de bande dessinée de science-fiction anglaise créée par le scénariste Mike Butterworth et le dessinateur Don Lawrence. Elle est extrêmement connue et populaire au Royaume-Uni où elle a bercé toute une génération de lecteurs.

Publiée par le bimensuel Ranger, puis l'hebdomadaire Look and Lean de 1965 à 1982, elle traitait d'événements survenus dans le contexte d'un empire sur la planète lointaine d'Elekton. Par beaucoup de côtés, l'Empire de Trigan ressemblait à l'Empire romain.




Histoire

L'histoire débute par le crash sur Terre d'un vaisseau spatial dont l'équipage est mort. En analysant le contenu des archives présentes à bord, les savants mettent au jour l'histoire d'un empire ayant apparemment désormais disparu (le titre original de la série est Rise and Fall of the Trigan Empire).

Une tribu de nomades dont les territoires sont envahis par les forces d'un empire esclavagiste se fédère et se sédentarise pour lutter contre l'envahisseur sous la direction d'un leader visionnaire. Au prix de luttes et d'efforts constants ainsi que d'alliances avec les ennemis des Lokans, cette Tribu deviendra la nation la plus puissante de la planète avant de disparaître mystérieusement.




Analyse

Ancrage historique du récit

La transposition de l'histoire des civilisations antiques terrestres est particulièrement évidente : l'Empire de Trigan ressemble énormément à l'Empire romain. Il est fondé par un peuple nomade qui décide de s'établir dans une ville prenant le nom du fondateur (Trigo). Il tire ses connaissances initiales et son inspiration de la sagesse d'une civilisation qui l'a précédé (Péric est l'archétype du savant Grec, son nom rappelant « Périclès »), et fonde sa puissance sur une volonté expansionniste et les échanges avec les puissants empires voisins.

L'ennemi héréditaire des Trigans (les Lokans) fait énormément penser aux puissances asiatiques de l'époque. Beaucoup d'autres civilisations terrestres sont reconnaissables, tels les peuples africains et moyen-orientaux. Si l'histoire commence comme une saga, elle se transforme cependant rapidement en une série d'épisodes tenant plus du récit d'aventures et d'histoires courtes.







Le fil chronologique se dissout quelque peu quand la première génération (Trigo, Brag et Péric) vieillit et laisse les aventures à la seconde génération (leurs neveux et enfants), les avancées technologiques semblent faire du yoyo en passant de légions rappelant les armées romaines à l'utilisation de chars et de voitures, alors que l'aspect politique évolue peu, se limitant à l'ajout de représentants de nouveaux peuples rencontrés au hasard d'accidents d'avion. Vers la fin de la publication, Elekton se lance enfin dans la conquête spatiale et rencontre un nouveau peuple vivant sur une lune qu'elle annexe ; cependant l'histoire s'arrêtera sans qu'on ait progressé vers la fin de l'Empire et en particulier sans point de repère par rapport à l'apogée de l'Empire de Trigan.

Comme l'histoire était publiée à l'origine dans le magazine pour la jeunesse Look and learn, les thèmes abordés sont très manichéens. En particulier, l'Empire de Trigan est présenté de manière très orthodoxe comme un peuple puissant et bienveillant, au contraire des Lokans qui cristallisent les idées de fourberie, d'arrogance et de tyrannie.

En ce sens elle est fortement marquée par les valeurs en cours dans les années 1960, aussi bien dans la société (patriarcale, la femme étant cantonnée exclusivement au rôle d'épouse élevant les enfants en bas âge) que dans la politique : l'opposition Trigan / Lokan fait fortement penser a la répartition des forces de part et d'autre du rideau de fer.


Style graphique

Le style de Don Lawrence est aisément reconnaissable et évolue peu tout au long de cette série. Les éléments technologiques et le bestiaire sont tout à fait représentatifs de la production des années 1950 et 60 et paraissent aujourd'hui assez naïfs. Cependant, ceux-ci sont distillés dans une représentation plus que convaincante d'architecture et d'artisanat antique, ce qui fait que l'ensemble reste cependant très agréable à examiner aujourd'hui et que l'effet « rétro » n'affadit pas la lecture, comme cela est souvent le cas pour des romans d'anticipation où la technologie et les connaissances scientifiques dépassées rendent le développement des histoires totalement irréalistes.

À noter que la série a été continuée épisodiquement par d'autres dessinateurs après l'abandon de celle-ci par Don Lawrence, qui a quitté son éditeur et l'Angleterre à la suite de désaccords sur ses royalties pour aller s'installer aux Pays-Bas. Il continuera à dessiner et rencontrera un succès encore plus grand avec le titre Storm.





Storm est une série de bande dessinée mélangeant science-fiction et heroic fantasy, publiée en néerlandais chez Oberon à partir de 1978, avant d'être traduite en français par Glénat à partir de 1980.




Les vingt-deux volumes de la série en néerlandais peuvent se diviser en deux parties. La première (9 tomes) se déroule à différentes époques d'une Terre post-apocalyptique où les anciennes terres émergées sont devenues inhabitables et où les hommes se sont réfugiés dans les anciennes profondeurs des océans qui ont disparu. La seconde (13 tomes et toujours en cours) s'intitule Les Chroniques de Pandarve. Seuls une vingtaine de volumes ont été traduits en français. Ces chroniques sont situées dans un univers totalement différent constitué de mondes extra-planétaires gravitant autour d'un trou blanc.

Le style de l'histoire, à l'instar de Trigan, se fonde sur un décor de science-fiction dont les thèmes sont du plus pur space opera des années 1960, mais dont le développement tient plus du roman d'aventure voire de la fantasy. En particulier, la technologie cohabite et s'efface le plus souvent devant des outils antiques ou primitifs. Ceci permet de conserver l'intérêt d'un récit S.F. dont la représentation graphique des machines, ordinateurs et armes futuristes paraîtrait autrement aujourd'hui fortement datée.




La représentation du héros est également l'archétype du personnage du pilote / aviateur intrépide et vertueux, caractéristique d'une certaine époque (Buck Danny, Dan Dare…). Accompagnant le héros, Red Hair est un personnage dont la féminité de caractère est peu marquée ; cependant à ce point de vue la part de la femme est nettement plus présente que son équivalent dans l’Empire de Trigan et son incarnation nettement plus sexy.

Au niveau graphique, le style de Don Lawrence est caractéristique et immédiatement reconnaissable, bien qu'on puisse lui reprocher (en particulier sur la première partie) de manquer d'imagination et d'être un peu rigide ou théâtral. Celui-ci a cependant largement évolué dans la seconde partie.