samedi 5 mai 2018

Bande Dessinée - Rat God

De vacances on a ramené également cette BD de Richard Corben : "Rat God", fortement inspirée par l'œuvre de Lovecraft, entre horreur pure et humour noir !




Arkham, Massachussets, dans les années 1920. Clark Elwood, professeur au sein de la célèbre université de Miskatonic, rencontre la belle Kito, qui va immédiatement le séduire.

Mais Kito est originaire d’un village reculé, dissimulé aux yeux des hommes et de la civilisation moderne dans les vastes forêts ancestrales du Massachusssets, où se pratiquent encore des rituels païens en hommage à de monstrueuses divinités oubliées…




L'histoire :

Près d'un pont, une voiture s'arrête. Le professeur Clark Elwood en descend. Celui-ci est en route pour le village de Lame Dog, un endroit où la femme dont il est tombé éperdument amoureux pourrait se trouver. L'homme a cru apercevoir de l'autre côté la silhouette de sa bien-aimée mais en réalité, c'est un homme qui s'approche de lui. Il prétend être le frère de Kito et pouvoir le guider. Clark le prend à bord de son véhicule et ensemble font un bout de chemin. Après une halte à la station-essence, le passager reproche à Clark de mal considérer l'homme qui les a servi à cause de ses origines et va même jusq'uà l'expulser de sa voiture au milieu de nulle part. Alors qu'il ramasse ses affaires et avance vers le nord, Clark est poursuivi par une énorme panthère noire. Alors que l'animal se jette sur lui, des chasseurs touchent la bête qui s'enfuie. Malheureusement, le professeur ne parvient pas à rejoindre ses sauveurs et finit par s'évanouir. Il se réveille dans une maison, près d'un feu avec le prétendu frère de Kito. Ce dernier lui demande d'arrêter sa quête et de rebrousser chemin...

Si vous êtes fan de Richard Corben, il ne fait aucun doute que vous avez déjà bâti une stèle à la gloire de Délirium. Depuis ses débuts, l'éditeur publie régulièrement des ouvrages du créateur de Den. Richard Corben est à l'écriture, aux dessins et même à la colorisation (où il est secondé par son épouse). Dans cet album, il a façonné un récit évoquant les ambiances d'un H.P. Lovecraft, des atmosphères teintées de folie et de personnages troubles. Richard Corben s'amuse en plus à y intégrer des allusions aux légendes amérindiennes. Comme le montre la fabuleuse couverture, attendez-vous à des rituels païens et à des créatures aussi étranges qu'effrayantes. Si les ingrédients sont là pour établir un nouveau chef d'œuvre. Les dessins de Richard Corben restent toujours exceptionnels. Ce trait caricatural est d'une originalité incroyable et ce, près de 50 ans après sa première apparition. Rat God est imparfait, un peu bancal par moment, génial à d'autres.




Ce qu'on note, c'est que Richard Corben qui, ordinairement, se contentait de quelques pages fulgurantes pour des récits aussi brefs que, parfois, décousus, s’essaie ici à une histoire complète de plus de cent pages, en plusieurs chapitres, cohérente et bien narrée. Ratgod (le rat-dieu donc, mais aussi le Dieu-rat) évoque bien sûr Lovecraft ou ses disciples, mais aussi un certain cinéma dans la lignée ambianciale des Massacre à la tronçonneuse. Corben connaît ses classiques. Dans le genre, il ne cherche pas à innover par sa trame narrative, mais par son dessin, qui va souvent plus loin que les caméras n’en sont capables.

Avec le temps et le talent, son trait s’est épaissi mais clarifié, ses couleurs assombries. Le scénario, lui, rappelle bien des histoires du XIXe siècle états-unien. Une campagne arriérée, des personnages dégénérés, des Indiens amers et des Amérindiens en voie d’extinction, des maisons sinistres, des femmes nues délurées, une fillette dangereuse, des animaux diaboliques, des rituels exotiques, des morts-vivants et des vivants-morts, tout y est. Pourtant cette histoire reste originale, transcendée par le pinceau de Corben.

L’ombré et le dégradé, où l’ordinateur semble venir au secours de la main, donnent à chaque case une finesse d’une rare précision. Elle contraste parfois avec un flou savamment entretenu, dans un clair-obscur inquiétant, où éclatent des aplats très nets, eux, à l’effet percutant.

On notera que son hésitation entre réalisme et détail satirique persiste avec les années. C’est ce qui peut classer Corben parmi les grotesques, tant sa volonté de surenchère fait parfois basculer l’horrible vers l’invraisemblable. Les personnages féminins, mamelus à l’extrême, jamais vraiment ni laides ni jolies, renforcent cette impression. En ce sens, Richard Corben est bien un artiste à part dans la BD de son pays, du temps de l’underground auquel il fut rattaché comme aujourd’hui.

Personnellement j'adore Richard Corben depuis les premières histoires de Den que je lisais adolescent dans USA Magazine. Même si je préfère des univers comme celui de Den, cette Bande Dessinée reste très intéressante et le travail graphique de Corben justifie à lui seul cet achat.

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