dimanche 31 mai 2020

Jeu Vidéo - Snatcher

En ce moment je m'intéresse pas mal à tout ce qui touche de près ou de loin au Cyberpunk, ce n'était pas mon genre de prédilection jusqu'à maintenant mais je me rend compte que le style est fascinant et colle très bien avec ce que j'ai envie de proposer dans mes prochaines parties (du moins certains aspects). Ce que j'ai envie de faire, c'est de ponctuer mes campagnes dans le Multivers et les dimensions lointaines par quelques enquêtes urbaines typique de ce genre. Ce matin, en déjeunant je suis tombé sur une émission où il parlait de Snatcher, un vieux jeu vidéo d'Hideo Kojima et il me semble intéressant d'en parler car on se retrouve vraiment dans cette ambiance Cyberpunk très années 80 dont j'ai envie de m'inspirer et le Pitch du jeu est pas mal pour un scénario.




Quand on pense au nom d'Hideo Kojima, une saga vient immédiatement en tête : Metal Gear Solid. Or, ce serait une grosse erreur de ne le limiter qu'à cette série alors qu'il y a eu un avant très glorieux. Entré chez Konami en tant que game-planner en 1986, Hideo Kojima se retrouve rapidement aux commandes de son premier jeu : Metal Gear, sur ordinateur MSX, qui sera plus tard porté sur la Nes dans une version modifiée sans son accord. Dès le départ, sa production soulève une évidence : Kojima est un passionné de cinéma et ne conçoit pas un jeu sans une grande aventure spectaculaire enrichie de nombreux rebondissements.

Ce n'est en effet un secret pour personne qu'Hideo Kojima est un réalisateur de cinéma frustré, qui n'a jamais eu l'opportunité de s'attaquer à son rêve. Il a donc décidé de l'atteindre par une voie transversale, via le jeu vidéo. Et son prochain projet, augmenté par une nouvelle technologie - le CD-Rom, va lui permettre d'aller encore plus loin dans le mariage des genres.

C'est en 1988 qu'il sort son nouveau titre, Snatcher, tout d'abord sur PC-8801 et MSX2, exclusivement au Japon, avant de l'adapter sur des supports plus ambitieux comme le Mega-CD, la PC-Engine Super CD-Rom et, bien plus tard, sur PlayStation et Saturn. Mais la volonté d'en faire un jeu novateur et purement cinématographique est là, dès le départ, en dépit des limitations techniques des premières machines.




Pourquoi Snatcher est-il culte ? "Parce qu’il y a marqué Hideo Kojima sur la pochette", s’exclament déjà les sceptiques. Pas vraiment. Lorsque Snatcher déboule sur le marché japonais en 1988, le papa de Metal Gear est encore un illustre inconnu. Ce n’est d’ailleurs pas lui qui est chargé de présenter le jeu à la presse, mais Naoki Matsui, son superviseur jugé plus à même de remplir ce rôle en raison de sa petite notoriété. C’est pourtant bien Kojima le véritable auteur et cela se ressent assez rapidement, son style imbibe littéralement l’expérience. Pas seulement parce que le robot sidekick de Gillian s’appelle Metal Gear MK. II ou que le bar de Neo Kobe que nous visitons s’appelle Outer Heaven, non. C’est surtout parce que nous y retrouvons sa façon de raconter une histoire, son art du story telling avec ses habituels rebondissements et étonnantes pirouettes scénaristiques.




Mais ce qui rend également cette expérience fascinante, c’est son aspect "patchwork de pop culture". Impossible de le nier, Kojima s’est très largement inspiré de Blade Runner pour créer son univers et ses personnages. Gillian Seed ressemble dangereusement à Rick Deckard, Neo Kobe au Los Angeles du film, nous sommes dans une sorte de contrefaçon complètement japonaise du long-métrage de Ridley Scott. Pourtant, malgré une configuration de base assez proche, Snatcher est porté par une écriture et un propos bien différent. Là où Blade Runner nous amène à réfléchir, entre autres, sur ce qui fait notre humanité, l’œuvre de Kojima se concentre, elle, sur notre rapport aux machines et la peur du grand remplacement. Un propos soufflé par un autre classique du cinéma, Invasion of the Body Snatchers, alias L'Invasion des profanateurs de sépultures. Ajoutez à cela une pointe d’Akira dans la représentation d’un monde futuriste décadent (et des motos), un peu de Terminator pour l’aspect si inquiétant des Bioroïdes et vous obtenez une œuvre qui fleure bon les années ’80. Si vous êtes cinéphile, vous trouverez en Snatcher une tripotée d’influences sci-fi qui ne manqueront pas de vous faire sourire. Dans la version japonaise, on peut même voir l’Alien de Giger au club Outer Heaven !




Snatcher nous plonge donc en pleine science-fiction cyberpunk. Nous y incarnons Gillian Seed, un "Junker" de 31 ans, habitant la mégalopole de Neo-Kobe en 2046. Son boulot ? Repérer et éliminer des "Snatchers", des cyborgs pouvant se fondre dans la foule anonyme, organismes cybernétiques super-évolués qui sèment la terreur parmi les humains.




Amnésique, et accompagné de son assistant robotique Metal Gear MK 2, Gillian enquête sur la mort de son collègue Jean-Jack Gibson pour finalement mettre à jour une grande conspiration en lien avec un incident s'étant produit 50 ans plus tôt, à Moscou et qui avait causé la mort de la moitié de l'Humanité, qui serait en lien avec l'origine des Snatchers tout comme avec son propre passé.




C'est donc dans une aventure en Point&Click et à la première personne qu'est invité le joueur, sachant que des phases de tir à la Virtua Cop agrémentent son enquête, dans une ambiance on ne peut plus adulte et dark du meilleur effet.

Visuellement, les Snatchers ne sont jamais que des Terminator, d'ailleurs ils ont dû être légèrement modifiés afin d'éviter un gros procès pour plagiat.




Neo-Kobe, quant à elle, est une cité très inspirée du Neo-Tokyo d'Akira, jusque dans ses faisceaux lumineux qui transpercent le ciel, ses néons ou encore les couleurs de ses bâtiments. Enfin, impossible de ne pas mentionner l'apparence de Random Hajile, copie conforme du Feyd Rautha interprété par Sting dans le Dune de David Lynch.




Néanmoins, limiter Snatcher à une grosse entreprise de plagiat serait une énorme erreur puisque, déjà à l'époque, Kojima parvient à se réapproprier toutes ces influences pour les resservir à sa sauce. Comme il l'a fait plus tard dans la saga Metal Gear Solid, les clichés invoqués ne sont qu'une base de départ, terrain idéal pour que le développeur y plaque toutes ses obsessions.

Et c'est exactement ce à quoi nous avons droit ici puisque, très rapidement, les grands thèmes emblématiques de Kojima font surface : le mensonge d'État, la conspiration, la quête d'identité, le passé refoulé, l'amour contrarié et le besoin impératif de s'accomplir pour accéder à un semblant de bonheur. Il est d'ailleurs étonnant de voir à quel point, dans son cœur, Snatcher nous présente déjà, plus ou moins, la même intrigue que les aventures de Snake.




Comme tout vrai auteur, Hideo Kojima est parcouru des mêmes thématiques d'une œuvre à l'autre, qu'il creusera au fil du temps, tout comme d'obsessions similaires d'un titre sur l'autre. Ainsi, le jeu est particulièrement graphique, voire gore par instants, tout comme il prend un malin plaisir à se jouer de son utilisateur à travers des dialogues secrets, des clins d'œil divers et variés et des passages gentiment fripons.

S'il y a peu d'espoir dans Snatcher, Kojima ne se contentera cependant pas que de ça puisque, en 1990, sort sur MSX2 SD Snatcher, version kawaï de l'aventure cyberpunk. En fait, il s'agit d'un tour de passe-passe de Konami et Kojima qui n'avaient pas inclus le troisième acte de l'aventure dans les versions originelles de Snatcher.




Le jeu, plus à dominante RPG toutefois, est présenté en mode Super Deformed (SD, donc), ce qui signifie que les personnages ont des traits enfantins avec leurs grosses têtes sur leurs petits corps. Ce qui donne un effet particulièrement dérangeant puisque l'on se retrouve avec un design des plus mignons dans une aventure cruelle, déprimante et sombre.




Snatcher est donc un produit typique de son époque, mais reste à la fois un OVNI dans son genre. Ce n’est absolument pas une production traditionnelle pour Konami, un studio alors connu pour ses shoot’em up et autres expériences misant plus largement sur le gameplay. Juste après Metal Gear, Kojima change donc complètement de registre en proposant une sorte de film interactif particulièrement sombre. Car ce qui a fait le succès de Snatcher, c’est également sa violence très crue et son atmosphère oppressante. Au Japon notamment, certaines scènes gores ont fait débat, une partie de la critique parlant d’une surenchère d’hémoglobine malsaine, l’autre saluant une production n’ayant pas peur de s’adresser uniquement aux adultes. Mais cette ambiance étouffante émane aussi des nombreux thèmes complexes que Kojima continuera d’explorer par la suite tels que la condition humaine, l’aliénation et la survie d’un être au sein d’un monde écrasant. L’amnésie de notre héros, ressort scénaristique déjà surutilisé à Hollywood, ajoute un enjeu supplémentaire à notre mission : Gillian Seed est en quête d’une identité. (Sources diverses)


5 commentaires:

  1. A l'époque, ce jeu me faisait rêver, mais je n'ai jamais pu avoir de Mega CD. J'ai pu donc réaliser ce fantasme grâce à l'émulation. C'est un super jeu ! Malheureusement, je ne suis pas allé jusqu'au bout...faute de temps disponible. J'y rejouerai certainement un jour.
    Si tu aimes le cyberpunk et que tu es adepte du retrogaming, je te le conseille vivement ! Dans le même genre aventure/enquête dans un monde cyberpunk, mais plus Point&Click (et sans les superbes cinématiques de Snatcher), il y aussi DreamWeb sur DOS. Je pense aussi à l'OAV Cyber City Oedo 808. Je ne suis généralement pas fan de japanimation mais j'avais beaucoup aimé. A voir, si tu ne connais pas ! Ça pourrait te donner des idées. J'avais le jeu sur la NEC PC Engine CD : une aventure textuelle (en japonais ^o^) que je n'ai évidemment jamais pu mener à bout malgré mon acharnement (j'étais jeune et plein d'espoir à cette époque ^^). De nos jours, il n'existe toujours pas de traduction du rom. Quel dommage !

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  2. Je rajoute Void And Meddler ! Point&Click/aventure textuelle sur PC (je n'ai joué qu'au premier épisode en 2015) à l'ambiance extraordinaire et avec un super OST. A essayer, vraiment : http://voidandmeddler.com
    Au niveau son : Mega Drive - 198XAD, Dan terminus - "The Wrath of Code"-, les MASTER BOOT RECORD et les Dark 80's Synthwave Mix, tous très typés années 80 m'avaient bien intéressé à un moment. Mais il y en a tellement d'autres du même genre !

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    1. Je te remercie pour l'info concernant Cyber City OEDO 808, je viens de trouver les 3OAV en VF sur YouTube je vais me les regarder et les mettre sur le Blog. Merci pour toutes ces références, d'ailleurs concernant la musique, il me semble que j'ai déjà écouté des trucs de Mega Drive sur YouTube mais tu les as en disques ? Je me demande si je peux trouver ce type de morceaux en vinyles, peut-être sur Bandcamp ? La PC Engine, que de souvenirs, je ne l'avais pas personnellement mais j'avais hérité de celle d'un pote qui me l'avait laissé quelques mois à la maison et si je me rappelle bien j'ai énormément joué à Populous dessus à l'époque... Je n'avais que ce jeu à disposition et un jeu de tir avec des dragons, Dragon Spirit je crois bien...

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  3. Ce sera peut-être l'occasion de revoir les 3OAV, qui m'ont laissé un excellent souvenir !
    Non, ce n'est habituellement pas la musique que j'écoute, mais je commence à m'y intéresser un peu. Tu peux trouver du merchandising sur Bandcamp mais les vinyles sont souvent en édition limitée.
    J'ai beaucoup aimé la PC-Engine. C'était une console très innovante et en avance pour son époque (avec l'utilisation du CD). Malheureusement elle n'a jamais été "officiellement" importée en France et tous les jeux qui me faisaient rêver sur les magazines n'ont jamais d'eu d'édition US ou EUR. Par chance, il y a de plus en plus de traductions de roms en émulation.

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    1. Oui c'est ça le soucis avec Bandcamp, mais je vais y jeter un œil. Oui j'avais vu une émission sur la PC-Engine qui expliquait qu'à sa sortie, elle bénéficiait d'une technologie moins performante que les consoles Nintendo ou Sega de l'époque mais le CD faisait toute la différence et lui permettait d'avoir des jeux encore plus proche des versions arcades que les deux autres. Mais c'est vrai que mon pote avait énormément de mal à se procurer des jeux, je crois que c'est son frère qui voyageait beaucoup pour son boulot qui lui avait ramené de voyage avec quelques jeux si mes souvenirs sont bons. Il faudrait que je me penche sur les émulateurs, mon fils est fan de Retrogaming et utilise énormément les émulateurs pour jouer à des vieux jeux Nintendo, il veut même en installer sur une Nes mini et il m'avait parlé d'une vidéo qu'il avait vu pour installer un émulateur PC-Engine dessus je crois, je vais lui demander tiens !!!

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