samedi 2 mai 2020

La télépathie

Parmi les PJ de notre nouvelle campagne, basée sur nos nouvelles règles maison, il y a l'homme au costume bleu. Nous avons tiré les caractéristiques en nous basant sur les règles d'Into the Odd. Je voulais au départ me limiter aux simples caractéristiques et jets de dés adéquats et construire le reste autour des concepts de Millevaux Mantra. Mais dans Millevaux Mantra, les personnages commencent l'aventure nus et sans souvenirs, avec juste un objet. Pour adapter cela à notre jeu avec figurines, j'ai décidé de suivre la règle d'équipement de départ d'Into the Odd en ne choisissant qu'un objet dans les tables proposées. Pour l'homme au costume bleu, il m'a semblé plus fun de choisir la capacité proposée dans son "package de départ" et qui était Télépathie. J'ai de suite vu les possibilités que celle-ci pouvait m'offrir pour développer son background et le lier à notre ancienne campagne.




Pendant longtemps, les télépathes ont été des artistes de spectacle à part, le concept de ce genre de numéro est relativement récent.

Il semble que l'idée première d'une démonstration de télépathie en duo et en public remonte à 1781 présentée par Philippe Breslow à Londres, mais il n'existe à ma connaissance aucune preuve tangible de ce fait.

En 1784, Pinetti aurait présenté un spectacle de télépathie à deux à Londres, la signora Pinetti selon l'affiche de l'époque se proposait de "deviner toutes choses imaginées et proposées à elle par n'importe quelle personne de la compagnie". Bien sûr il s'agit d'une publicité mais on peut imaginer que ce sont la les balbutiements de la télépathie de music-hall. En effet la Signora Pinetti assise, les yeux bandés, dans une loge d'avant-scène devinait (selon une description de Decremps) les cartes choisies par les spectateurs.

C'est généralement à Robert Houdin que l'on attribue les premières expériences de télépathie à deux de scène vraiment structurées qu'il présentait avec son fils sous le nom de "seconde vue".




Mais il y a une autre histoire relatée par Alfred de Caston dans son livre "les vendeurs de bonne aventure" qui met en scène la femme du barbier d'une petite ville espagnole qui, du premier étage du salon de son mari, pouvait décrire sans les voir les clients qui entraient dans le salon ainsi que leurs vêtements et ce qu'ils avaient dans les poches... le concept était né !

Un voyageur français, témoin du phénomène, en parla à Robert Houdin qui, quelques mois plus tard le 12 fevrier 1846, commençait avec son fils un numéro similaire qu'il appela "seconde vue".

Ce spectacle eut un succès retentissant au point que nombre de magiciens tentèrent de l'imiter, voire de le copier. Il y eut Lasaigne et sa Somnambule, Robin et Madame Robin. Aux USA il y eut Hermann the Great, en Angleterre Robert Heller et madame Heller, puis de nombreux forains se servirent de la seconde vue pour vendre des horoscopes ou dire la bonne aventure.




Le succès de ce genre de numéro ne fit que croître, vers 1867 vinrent les frères Bonheur puis Raynaly, De Thorcey, Delatorre et Djina. En Angleterre il y eut David Devant, Dora et aux Etats unis les fameux Zancig qui furent les premier à obtenir d'importants cachets avec ce genre de numéro.




En s'approchant un peu plus de notre époque, il faut citer Robertson et Lucille qui travaillerent longtemps avec le magicien Bénévol, Luckry et Mayanne, les Piddingtons, Xavier Morris et Veronica et il est à noter le duo O'Shan et Naga qui dans les années 60 présentait un surprenant numéro de transmission de pensée mêlant mentalisme et streap-tease. Les spectateurs volontaires pensaient à une partie des vêtements de Naga qu’elle devait deviner et retirer.

Il faut mentionner également aux Etats unis le formidable numéro de mentalisme de Falkeinstein & Willard qui présentait outre le numéro de transmission de pensée mais aussi la cabine spirite à une vitesse ahurissante.

Il est impossible de parler de la télépathie au music-hall sans évoquer les extraordinaires Myr et Myroska qui furent le spectacle de télépathie le plus célèbre, Myr et Myroska ont fait le tour du monde avec leur numéro et ils restent présent même de nombreuses années après leur disparition.

La télépathie moderne est brillamment représentée, avec peu de numéros mais toujours de qualité, on peut citer aux Etats unis: les Evasons, Larry and Raven, en Autriche The Clairvoyants, en Espagne Jorge Prieto & Olga Mslovska, en France Gilles et Blaise (maintenant Gilles et Mathilde), dans le sud de la France Edouard et Sarah ainsi que Claude Jan et Christine, à Lille Philippe Warein et Laurence et à Paris les Gilsons ainsi que Wanda et Viktor avec leur spectacle de mentalisme et de télépathie.




Malgré tout, la télépathie resta longtemps une utopie méconnue et pourtant majeure des avant-gardes du XXe siècle : le devenir télépathique de l’art à l’ère de la révolution immatérielle des télécommunications. Ce fantasme d’une projection directe de la pensée, balayant les conventions du langage, aura un impact considérable sur la naissance des premières formes d’abstractions, mais aussi, de façon tout aussi surprenante, sur le surréalisme et son obsession pour le partage collectif de la création et la libération des automatismes.

L’invention du terme « télépathie », se fit en 1882, quand l’étude de la psychologie se frotte aux récents développements des technologies du lien et de l’image – de la télégraphie sans fil à la future télévision. Des tentatives de « photographie de la pensée » (1895) aux premiers encéphalogrammes (1924), c’est l’activité même du cerveau qui se donne à voir et pousse les artistes à abattre les conventions de la représentation. Davantage que de se soustraire au poids des normes académiques, il s’agit de supprimer toute contrainte de traduction et tout obstacle matériel dans les échanges, à l’instar de la télépathie qui, loin de rester une obscure fantaisie occulte et paranormale, ne cesse d’intriguer et de subjuguer les artistes. Cette idée d’un devenir télépathique, omniprésente dans l’univers de la science-fiction, refait surface dans l’art psychédélique et conceptuel des années 1960-70, avant de resurgir aujourd’hui dans des pratiques contemporaines envoûtées par les technologies.

A une époque, la télépathie connue donc un certain succès, et même Albert Einstein y fut confronté. Tout le monde connaît les contributions d’Einstein à la science ainsi que son influence sur la philosophie de la science, mais ce grand génie a également accueilli d’autres sujets scientifiques moins orthodoxes comme la télépathie.




En fait, Einstein croyait aux capacités télépathiques et il a dit un jour : “Je clos ces expositions, qui sont devenues assez longues, concernant l’interprétation de la théorie quantique avec la reproduction d’une brève conversation que j’ai eue avec un important physicien théorique. Je suis enclin à croire en la télépathie.”

Einstein savait-il que la mécanique quantique pouvait expliquer la télépathie ? Beaucoup de ceux qui prétendent avoir des pouvoirs télépathiques sont des charlatans.

La majorité des scientifiques modernes rejettent les capacités télépathiques, mais il y en a aussi quelques-uns qui suggèrent que nous n’avons pas suffisamment étudié le phénomène et que de véritables télépathes pourraient exister.

Albert Einstein n’était nullement un scientifique qui encourageait l’étude des pouvoirs psychiques présumés. Einstein était un homme terre-à-terre, mais il savait apprécier les mystères de notre monde et de l’Univers. Comme Einstein l’a dit un jour : “La plus belle chose que nous puissions vivre, c’est le mystérieux. C’est la source de tout art et de toute science véritables. Celui à qui l’émotion est étrangère, qui ne peut plus s’arrêter pour s’émerveiller, est comme mort ; ses yeux sont fermés.”

C'est sa rencontre avec Wolf Messing (1899 – 1974) qui mis Einstein face à cette pratique. Wolf Messing était un célèbre médium et télépathe dont les pouvoirs étaient pris au sérieux par Staline. Messing possédait la capacité de trouver des objets cachés, de lire dans les pensées, de prédire l’avenir et d’utiliser le pouvoir de suggestion. Il est devenu le plus célèbre médium européen dans les années 1920 et 1930.

Dans “The Secret KGB Paranormal Files” d’Amazon Prime, l’animateur Roger Moore révèle que dans les fichiers KGB découverts, il y a des informations sur la rencontre de Messing avec Sigmund Freud et Albert Einstein.

Au cours de cette réunion qui a eu lieu dans l’appartement d’Einstein, Messing a démontré ses capacités télépathiques.

Selon Russia Beyond, Messing a dit à Freud : “Fais un vœu, et ton vœu est un ordre.” Puis il est venu voir Einstein, et a retiré trois cheveux de sa moustache. “C’est ce que tu as souhaité ?” demanda-t-il en se tournant vers Freud. “Oui, répondit Freud.”

Einstein a dû prendre la télépathie au sérieux, sinon il n’aurait pas écrit la préface du livre d’Upton Sinclair Mental Radio, publié en 1930, dans lequel les auteurs discutaient des pouvoirs psychiques.

En écrivant l’avant-propos d’un livre sur la télépathie, Einstein mettait en péril sa réputation de scientifique sérieux et logique.

J’ai lu le livre d’Upton Sinclair avec beaucoup d’intérêt et je suis convaincu qu’il mérite la plus grande considération, non seulement des laïcs, mais aussi des psychologues de profession. Les résultats des expériences télépathiques soigneusement et clairement exposés dans ce livre sont certainement bien au-delà de ceux qu’un investigateur de la nature considère comme pensables. D’autre part, il est hors de question, dans le cas d’un observateur et écrivain aussi consciencieux qu’Upton Sinclair, qu’il se livre à une tromperie consciente du monde de la lecture ; sa bonne foi et sa fiabilité ne doivent pas être mises en doute. Donc, si les faits exposés ici ne reposent pas sur la télépathie, mais sur une influence hypnotique inconsciente d’une personne à l’autre, ce serait aussi d’un grand intérêt psychologique. En aucun cas les cercles psychologiquement intéressés ne doivent passer inaperçus sur ce livre”, a écrit Einstein dans la préface du 23 mai 1930.

Il est donc juste de dire qu’Einstein a soutenu la possibilité que la télépathie puisse être réelle, et oui, il était un scientifique ouvert d’esprit.

Aujourd'hui, pouvoir parler avec quelqu'un par la pensée, comme les héros des personnages de Stephen King grâce à un pouvoir, ou comme dans le manga Ghost in The Shell grâce à un implant cybernétique, sont des choses qui commencent à être envisageables. Pendant longtemps, cette faculté est restée un fantasme, techniquement impossible, même grâce à la science. Et pourtant, la science pourrait en fait nous surprendre.




Depuis que l’on sait que les informations du cerveau se transmettent de neurone à neurone via des impulsions électriques, et que l’électricité transmet de l’information, il n’y a qu’un pas à franchir pour que ces impulsions puissent communiquer, dans un sens ou dans l’autre, avec un appareil qui peut convertir des impulsions électriques en signal informatique, un ordinateur. Dont acte : il est aujourd’hui possible de piloter un drone ou un petit appareil moteur par la seule pensée, de même que des ordinateurs assistés par de puissants algorithmes commencent à décrypter nos pensées. Mais jusqu’où notre cerveau pourra-t-il communiquer avec la machine, et la machine lire nos pensées ?




Autrefois, dans les années 1970-80, les États-Unis et la Chine ont investi des millions de dollars et de yuans pour comprendre certaines "fonctions exceptionnelles du corps humain" et développer chez leurs soldats respectifs des super pouvoirs psychiques, dont la "perception extrasensorielle". Au final, les résultats les plus probants se sont rapprochés des fameux "mentalistes" qui utilisent leur sens de la déduction et de l'analyse des situations pour deviner des choses. Mais rien de plus.

Actuellement, les transhumanistes, ces adeptes d'un courant de pensée qui consiste à croire à l'augmentation de l'humain grâce aux nouvelles technologies, et à sa transformation en surhomme (ou Homme +) pour tenir tête aux machines, considèrent que les technologies de télépathie débarqueront bel et bien, dans un futur proche, sous forme d'implants pouvant communiquer entre eux.

Le "body hacker" Kevin Warwick, professeur de cybernétique à l'Université de Reading, en Grande-Bretagne, planche dur pour "connecter" le système nerveux humain et les ordinateurs. Ce transhumaniste forcené, qui se considère comme le premier “cyborg” de l’histoire, s’est greffé des puces dans le corps. Des électrodes, dans son bras, sont reliées à son système nerveux et à un ordinateur. Elles lui permettent de commander, par la pensée, un ordinateur ou une main robotisée. Pour lui, la télépathie sera la prochaine étape. À terme il espère pouvoir se greffer une puce électronique dans le cerveau, afin de communiquer à distance, peut-être via Internet, ou par transmissions de pensée. Selon lui, la "sélection naturelle" finira par faire de la télépathie le "premier mode de communication" entre les hommes, car ils en auront besoin pour évoluer vers le statut de "posthumains".

On pourrait bien entendu se dire qu'il ne s'agit que du doux délire d'un fan de paranormal et de science-fiction, mais à part Kevin Warwick, des chercheurs bien sérieux y travaillent réellement, qu'ils soient transhumanistes ou non. Leur but n'est pas toujours de parvenir à la "télépathie" : ils conçoivent par exemple des "interfaces homme - machine" pour permettre à des handicapés de (re)marcher en commandant des prothèses ou des exosquelettes par la pensée. Toutefois… via leurs recherches, ils participent à créer une technologie qui demain pourrait se rapprocher de celle utilisée dans Ghost in the Shell. Mais certainement pas du pouvoir de télépathie du Professeur X.




Pour l'instant, ce ne sont pas des "pensées" qui passent d'un cerveau à une machine, mais des influx nerveux. Mais les "interfaces homme - machine", que développent des chercheurs un peu partout dans le monde, fonctionnent déjà. Et même si elles coûtent cher et que leurs fonctions sont limitées, elles permettent à des patients (car il s'agit, répétons-le, de recherches à visées médicales) de commander des membres artificiels ou des machines.

Le système BrainGate transforme ainsi les tétraplégiques en chevaliers Jedi, en leur permettant de contrôler, à distance, des objets. Une puce, implantée dans le cerveau, convertit l’intention de l’utilisateur en commandes informatiques, destinées à un ordinateur. Ainsi, la personne handicapée peut-elle déplacer des objets par la pensée, allumer la lumière, surfer sur Internet ou zapper sur sa télé.

D'autres interfaces cérébrales non invasives (sans implant, juste en apposant des électrodes sur le cuir chevelu), que l'on appelle aussi "interfaces ordinateur-cerveau non invasives" ou "interfaces neuronales directes" (IND), permettent aux handicapés de bouger leurs fauteuils roulants par la pensée. La "prothèse intégrale" de Miguel Nicolelis a de son côté fait sensation lors de la cérémonie d’ouverture de la coupe du monde de football 2014 au Brésil : Julian Pinto, un jeune paraplégique, avait tapé dans un ballon en utilisant une combinaison, qui lui permet aussi de marcher - en commandant ce qui est en fait un exosquelette, via des impulsions nerveuses captées par des électrodes placées sur son crâne.

En 2014, des chercheurs en neurosciences et en neurologie sont allés encore plus loin. Ils prétendent avoir réalisé la toute première expérience au monde de télépathie, en permettant à deux humains de communiquer à distance, alors qu'ils se trouvaient… sur deux continents différents. Rien que ça.

Les scientifiques de la Harvard Medical School (à Boston) et de l'Université de Barcelone, ont pour cela conçu (avec la société française Axilum Robotics, et les firmes barcelonaises de "neuro-électronique" Starlab et Neuroelectrics) un "casque d'électro-encéphalographie" sans fil, ainsi qu'un "robot de stimulation magnétique transcrânienne".

Doté d'électrodes, tout comme celui qui permet de commander l'exosquelette de Miguel Nicolelis, le casque enregistre les "signaux cérébraux" de son porteur. Celui-ci pense par exemple à un message simple, comme "bonjour" ou "salut". Puis un ordinateur "convertit" ces impulsions électriques en code binaire, et un message est envoyé sous cette forme à un sujet humain "récepteur", via Internet. De l'autre côté, donc, un autre ordinateur (qui peut se trouver au bout du monde) transmet le "message" au cerveau d'une autre personne, sous forme de "flashs lumineux". Le "récepteur" est alors capable de comprendre le message qui lui est envoyé en interprétant les signaux lumineux, sans entendre ni voir les mots eux-mêmes. Un genre de "code morse" mental, en quelque sorte.

Concrètement, dans cette histoire, la "transmission de cerveau à cerveau assistée par ordinateur" a été menée en Inde, à Thiruvananthapuram (État du Kerala), et en France, à Strasbourg. Les chercheurs impliqués dans cette expérience ont mêlé deux technologies : l'électro-encéphalographie (EEG) et la stimulation magnétique transcrânienne (rTMS).

Sans trop rentrer dans le détail, ni vouloir vous assommer, mais pour que vous compreniez l'essentiel, l'EEG mesure d'un côté l'activité électrique du cerveau par des électrodes placées sur le cuir chevelu, souvent représentée sous la forme d'un tracé appelé "électro-encéphalogramme". Un peu comme l'électrocardiogramme, qui permet d'étudier le fonctionnement du cœur, l'EEG est indolore et non-invasif, et permet de connaître l'activité "neurophysiologique du cerveau" au cours du temps, notamment le cortex cérébral dans le cas de recherches en neurologie ou en neurosciences cognitives. Pour cela, un casque à électrodes, placé à la surface du crâne, et donc du tissu cérébral, capte les signaux électriques issus des neurones.

De l'autre côté, la rTMS est une technique médicale de stimulation transcrânienne (TMS), d'abord utilisée pour le diagnostic et le traitement de certaines affections psychiatriques et neurologiques. En neurologie, elle permet notamment de traiter des mouvements anormaux, des douleurs et des acouphènes. Mais depuis une quinzaine d'années, la rTMS est aussi exploitée par un nombre croissant d'hôpitaux (notamment en France) pour traiter les dépressions modérées à sévères, ou la maladie d'Alzheimer. Une interface homme-machine, testé à grande échelle depuis 2012 dans un centre de recherche biomédicale de Grenoble, permettrait ainsi, disent leurs concepteurs, de soigner la dépression, ainsi que les maladies cérébrales et neuro-dégénératives. La stimulation magnétique du cortex cérébral agit ici comme un médicament antidépresseur, et est non invasive, donc (à priori) sans le moindre effet secondaire. Une alternative, aussi, aux électrochocs.

En gros, donc, les chercheurs barcelonais et bostoniens ont mixé un casque à électrodes d'EEG, avec la rTMS - qui consiste très concrètement à appliquer des "impulsions" magnétiques sur le cortex cérébral à travers le crâne, au moyen d'une "bobine" électromagnétique, que l'on place au niveau d'un point ciblé du cuir chevelu. Des impulsions qui modifient l'activité de la région du cerveau visée, en la "stimulant". Ces deux technologies ont donc été "mêlées", et reliées à Internet.

En Inde, le "transmetteur" du message, muni d'un casque EEG, a été placé devant un écran sur lequel une balle se déplaçait de gauche à droite. Lorsqu'elle traversait la partie supérieure de l'écran, le cobaye devait s'imaginer en train de lever la main. L'activité cérébrale correspondante dans le cortex moteur, enregistrée par le casque, a alors été envoyée à un ordinateur, qui a traduit ce signal par un "1". Quand la balle se situait en bas de l'écran, le porteur du casque imaginait un mouvement du pied, traduit par la machine en "0". Chacun de ces bits ont finalement été envoyés par e-mail à Strasbourg, au siège d'Axilum Robotics : une série de 140 bits pour coder le mot "ciao", et une autre série pour le mot "holà".

À chaque bit reçu, une machine de rTMS (le fameux "robot de stimulation magnétique transcranienne" fabriqué par Axilum Robotics) envoyait des ondes électromagnétiques à l'arrière du crâne du récepteur… au niveau du cortex visuel. Quand il s'agissait d'un "1", le système envoyait une onde faisant naître, spécifiquement, un courant électrique que le cobaye "voyait" dans sa tête sous forme de flash lumineux. Dans le cas d'un "0", il ne s'agissait que d'une "stimulation placebo", qui ne produisait aucune "illusion visuelle". Selon les chercheurs, ce procédé fonctionne, et 85 % des bits seraient correctement émis et reçus, ce qui permettrait de transmettre correctement les "pensées" de l'émetteur.

Cette étude scientifique, approuvée par le Comité d'éthique de l'Université de Barcelone, et publiée à l'époque dans la très sérieuse revue PLOS One dans un article intitulé "Conscious Brain-to-Brain Communication in Humans Using Non-Invasive Technologies" ("La communication consciente de cerveau à cerveau chez les humains en utilisant des technologies non invasives"), a évidemment fait l'effet d'une bombe ; validant donc à priori l'idée d'une communication "d'esprit à esprit", d'un échange d'informations sans utiliser la parole, la vue, l'audition ou le toucher.

Selon les scientifiques à l'origine de cette expérience, il s'agit d'un "premier pas" dans l'exploration "d'autres moyens de communication", c'est-à-dire "d'interfaces directes" entre le cerveau et l'ordinateur, qui seraient pourquoi pas mobiles et miniaturisées, et qui permettraient à terme "une communication directe de cerveau à cerveau de façon routinière". Ouvrant aussi la porte à "de nouvelles possibilités dans les relations sociales", ajoutent les chercheurs. Ceux-ci parlent en fait de (re)donner la parole à des personnes muettes, ou de permettre à ceux qui ne voient plus et/ou n'entendent plus de capter des messages - mais leurs propos font aussi rêver nos amis transhumanistes.

Est-ce vraiment de la télépathie ? Il s'agit bel et bien d'une première "preuve de concept", ou "démonstration de faisabilité", d'une communication intracérébrale ; mais pour l'instant, les messages transmis via des signaux cérébraux demeurent basiques. Cette expérience est fascinante et excitante, pas la peine de le nier. Mais nous sommes encore loin de pouvoir réaliser ainsi une communication télépathique telle que nous l'imaginons, qui permettrait de se comprendre totalement par la pensée. Car des machines restent nécessaires, et aucun des participants n'a véritablement "lu" dans la tête de l'autre.

Très concrètement, quand on sait que l'expérience ci-dessus a pris 4 ou 5 heures pour être menée à bien (1h à 1h30 par mot, 2h pour "entraîner" les cobayes et calibrer les machines), et que le taux d’erreur varie entre 1 et 15 %, il semble difficile, voire impossible, de parvenir (du moins dans un futur proche) à envoyer ainsi des messages longs, et donc à avoir de cette façon de véritables "discussions" avec autrui par la pensée et à distance.

En 2018, d'autres scientifiques, cette fois au MIT, ont créé une interface cerveau-machine capable "d’entendre" et de "comprendre" les mots qu'une personne a en tête, sans même les avoir prononcés. Le casque en question, baptisé "AlterEgo", peut selon eux "analyser" nos pensées, et nous "répondre" via des dispositifs connectés en Bluetooth.

Le casque AlterEgo est (là encore) muni d'électrodes et de capteurs, placés au niveau de la mâchoire et du visage, qui aspirent les signaux neuromusculaires. Mais ce qui est nouveau par rapport à l'expérience de 2014, c'est l'utilisation d'un programme d'IA, qui analyse les mots "pensés". Grâce au Machine learning, ce dispositif serait ainsi capable de comprendre la "subvocalisation" en étudiant les signaux électriques envoyés par le cerveau dans les muscles qui commandent la parole. Car même si notre “voix intérieure” reste dans notre tête, le cerveau envoie des signaux électriques (invisibles) dans les muscles de notre visage, expliquent les chercheurs du MIT.

En plus d'entendre les mots dans notre tête, AlterEgo peut aussi, selon l'étude, nous répondre. Cette fois, le dispositif passe par la conduction osseuse (ostéophonie) pour transmettre les informations à la personne - via des vibrations transmises par les os du crâne. Ce qui permettrait en théorie d'échanger "en silence" avec le système.

Selon les scientifiques américains, les premières expérimentations étaient assez simples : elles consistaient à analyser la subvocalisation pendant une partie d’échec, ou durant la résolution de problèmes mathématiques simples. Le dispositif n’avait en outre appris qu’une vingtaine de mots sur les 200 000 possibles en langue anglaise. Mais AlterEgo aurait réussi à "communiquer" avec son utilisateur avec une précision… de 92 %.

D'un point de vue médicale, AlterEgo pourrait permettre aux muets de parler, en connectant le dispositif à un ordinateur équipé d’un synthétiseur vocal (un peu comme le faisait feu Stephen Hawking). On peut aussi imaginer, bien sûr, des communications par la pensée entre deux personnes portant un casque de ce type.

"Nous en sommes à la moitié de la collecte de données et les résultats sont bons. Je pense que nous allons parvenir à une vraie conversation un de ces jours", n'hésite pas à avancer Arnav Kapur, qui dirige les recherches au MIT Media Lab. Mais pour le moment, AlterEgo n'est utilisable que pour des actions très basiques - par exemple, utiliser par la pensée la plateforme de streaming Roku, sélectionner et de déplacer des fichiers sur un écran, jouer aux échecs, ou encore connaître l'heure.

Arnav Kapur reconnaît en outre qu'il faudra d’abord "collecter plus de données pour développer un modèle généralisé et multi-utilisateurs de dialogue silencieux", et ajouter "bien plus de vocabulaire dans les bases de données", avant de pouvoir espérer "tester le dispositif dans la vie de tous les jours" - pour parler à un assistant personnel, voire à un autre être humain. Donc la télépathie n'est pas vraiment, là non plus, pour tout de suite. Même si elle semble à portée de casque.




D'autres chercheurs et entrepreneurs, clairement transhumanistes cette fois, planchent de leur côté sur de potentiels implants cérébraux, qui iraient plus loin que le système Braingate (qui, rappelons-le, permet de commander un ordinateur par la pensée grâce à des "micro-électrodes" implantées dans le cerveau), en nous apportant le don de télépathie.

Depuis deux ans, le neurochirurgien Eric Leuthardt, de l’Université de Washington, prédit la naissance d'ici "quelques décennies", de "super humains" télépathiques. Bon, il faut savoir que ce scientifique est aussi auteur de romans de science-fiction - donc à rapprocher de Kevin Warwick et d'autres technoprophètes transhumanistes. Mais les implants cérébraux pour converser par la pensée ne sont pas qu'une vue de l'esprit, et la Silicon Valley s'active. À travers son entreprise Neuralink, Elon Musk, patron de SpaceX, finance ainsi depuis 2017 le développement d'un dispositif bionique qui serait intégré dans le cerveau (sous forme de puces minuscules "collées" sur les neurones), et qui aurait pour mission "d’optimiser la production mentale" d'une personne grâce à une interface cerveau-ordinateur. Théoriquement, avec un tel dispositif dans votre tête, vous seriez capable, entre autres, d’accéder à Internet et de communiquer par la pensée.

Là encore, il faut bien entendu rappeler que la création d'un tel système risque de prendre plusieurs années (en fait, plusieurs décennies de recherches). Pour l’heure, le projet de Neuralink est de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau, afin de “guérir des maladies”… et non de connecter nos neurones aux machines (et à Internet) d’ici 5 ans, comme le promet Elon Musk. Selon le Wall Street Journal, le but de la société est en fait, dans un premier temps, de guérir l’épilepsie ou la dépression grâce à des implants… afin de créer un tout nouveau marché.

Notons qu'à Menlo Park, en Californie, Mark Zuckerberg n'est pas en reste dans ce domaine. Depuis 2017, le "Facebook Reality Labs" tente de développer une interface cerveau-machine capable de décoder les mots qu'une personne veut prononcer, logés dans la partie du cerveau qui héberge le centre du langage. L'objectif est ici de nous débarrasser des écrans, en nous permettant d'envoyer des SMS ou de partager des photos par la pensée, par exemple. Mais aussi, transhumanisme oblige, de remédier à "l'obsolescence humaine", face aux progrès de l'IA.

Comme AlterEgo, le système sur lequel planche Facebook devrait fonctionner via un casque, afin de "transférer" les pensées d'une personne directement sur un écran d'ordinateur. Avant de transposer dans un second temps cette technologie dans un implant ? Pour l'instant, le système du Reality Labs ne peut décoder qu'une "petite sélection de mots", mais Mark Zuckerberg espère qu'il permettra "d'ici quelques années" à quelqu'un d'écrire 100 mots par minute, juste en les pensant. Il rêve même d'une "communication du futur" télépathique. Mais actuellement, nous sommes encore loin de ce rythme bien ambitieux. Ainsi, en 2017, des chercheurs de Stanford ont créé un implant crânien qui permet à des personnes paralysées d'écrire… Mais seulement 8 mots par minute.




Au-delà de la faisabilité technique de tous ces projets et dispositifs, le risque serait que seules des entreprises privées, comme Facebook, Neuralink, ou même Axilum Robotics, aient la main sur ces technologies. Et soient ainsi en mesure de dicter l’utilisation de la technologie selon leurs propres conditions.

Une étude récente de la Royal Society, une organisation scientifique britannique, prévient notamment que le fait de connecter le cerveau à un ordinateur pourrait "compromettre la vie privée" des individus. "Non seulement les pensées, mais aussi les expériences sensorielles, pourraient être communiquées d’un cerveau à l’autre. Les gens pourraient devenir télépathiques jusqu'au point de pouvoir converser sans parler et sans paroles - par l'accès aux pensées des autres à un niveau conceptuel. Cela pourrait permettre une collaboration sans précédent avec des collègues et des conversations plus approfondies avec des amis", peut-on lire.

“Mais le risque de voir ces pensées tomber entre de mauvaises mains existe”, ajoute la Royal Society. Des mauvaises mains qui pourraient appartenir à des entrepreneurs de la Silicon Valley désireux de tout savoir de nous, mais aussi à des hackers ou à des fonctionnaires.

"Si un casque lit dans votre tête, alors la police, l’ar­­mée ou vos parents pour­­ront-ils s’en servir ?", se questionne ainsi Mary Lou Jepsen, ancienne ingénieure chez Google X et Facebook, et fondatrice d'Openwater, une société spécialisée dans l'imagerie par résonance magnétique (mais seulement dans un but médical). "Ces technologies, clairement capables de lire nos pensées, auront de profondes implications éthiques et juridiques. Or, comme de nombreuses autres technologies, les interfaces neuronales grand public semblent destinées à atteindre les consommateurs avant d'être matures. Elles sont pour l'instant non invasive, et elles devront en tout cas le rester", conclut-elle, appelant tout simplement à la prudence et à la prise de recul.

Avant de rêver à la télépathie, mieux vaudrait donc d'abord peser le pour et le contre d'une technologie qui pourrait finalement révéler et transmettre nos pensées les plus intimes à n'importe qui.

On voit donc que la télépathie est un vaste sujet qui peut dans le cadre du Jdr couvrir différents aspects, Pulp ou merveilleux scientifique, contemporain ou cyberpunk et j'en passe.

Pour notre PJ au costume bleu, j'imagine les choses plus simplement, avec par exemple un background de base comme dans la nouvelle "Télépathie" de Paul Montfar que l'on peut découvrir dans les podcasts "Samedi Noir" de France Culture. Dans cette histoire, le héros, Marc travaille comme informaticien dans une grande entreprise. De nouveaux modes de management, des relations de travail inédites sur fond de restructuration, une nouvelle tête au sein de la direction, sans compter les changements qu’il remarque chez Julie, sa compagne, qui travaille dans la Com de cette même entreprise… c’est tout son univers professionnel et personnel qui se redessine sous ses yeux. Marc a bien du mal à s’adapter à ces évolutions rapides et se sent un peu perdu, C’est alors qu’il se découvre un don de télépathie et, par là-même, la possibilité de pouvoir reprendre en main sa vie qui lui échappe. La maîtrise insoupçonnée sur les événements que lui procure ce don le sort progressivement de son quotidien ordinaire et le propulse dans un monde où s’affrontent des héros dotés de super-pouvoirs…




Une autre piste serait une origine extraterrestre comme le héros de la vieille BD "Jaleb le Télépathe", parue dans les numéros 1 à 18 de Futura" (FU), mensuel en Petit Format des éditions Lug, en 1972 et 1973. Encore bébé, Jaleb a été accidentellement laissé sur terre par ses parents, membres d'une Fédération Galactique de peuples télépathes. Adopté par la famille Jellicoe, il grandit et devient télépathe, tout en étant ignorant de ses origines extra-terrestres, et ne faisant que les pressentir.
Il part ensuite dans une quête à la recherche de son peuple, croisant son chemin avec celui d'autres télépathes nés sur Terre, et combattant le crime. Puis, retrouvant son peuple, il devient impliqué dans une guerre civile entre les "légalistes" (conduits par le puissant Brandon Muir), opposés à l'égalité de droits avec les non-télépathes (considérés comme des "sous-peuples") et les "idéalistes" (dont font partie Jaleb et son amie Xani), qui luttent pour obtenir cette égalité.




Quoiqu'il en soit, mes joueurs pensent juste avoir affaire à un nouveau PJ pour mes nouvelles règles maison, mais moi j'y vois donc l'opportunité d'utiliser le pouvoir de télépathie de l'homme au costume bleu comme une explication (à développer au fur et à mesure des scénarios) de son ascension parmi les puissances qui régissent le Multivers pour en arriver au statut du personnage qui fut un allié puis un antagoniste de notre précédente campagne. Pour utiliser les pouvoirs de télépathie que je compte lier aux pouvoirs Psy dans leur ensemble, je vais me pencher sur ce que j'ai pu lire dans "La Frontière" et rajouter une capacité à ma fiche de PJ mais j'y reviendrai dans un prochain Post.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire